Conférence itinérante de la Société géologique de France

Les risques volcaniques, surveillance, prévision et prévention

Conf_Bardintzeff 1 Confférence de Jacques-Marie Bardintzeff 2

LES RISQUES VOLCANIQUES : SURVEILLANCE, PRÉVISION, PRÉVENTION

Compte-rendu de la conférence donnée par Jacques-Marie Bardintzeff
14 juin 2017 - amphithéâtre de sciences naturelles du Campus Saint-Charles
(Aix-Marseille Université) d’après des notes d’auditeurs

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La conférence itinérante 2017 de la Société géologique de France est reçue à Marseille par deux structures partenaires l’AGSE et le CEREGE. Patrick Gaviglio (président de l’AGSE) puis Olivier Bellier (directeur-adjoint du CEREGE) prononcent une courte allocution de bienvenue : présentation des structures représentées, rappel des liens tissés au cours de leurs collaborations (jury du CAPES pour l’un, recherches sur les relations entre sismicité et volcanisme en Indonésie pour l’autre).
La conférence richement illustrée de photographies(*) de J-M. Bardintzeff a permis de montrer comment les données acquises sur le terrain étaient exploitées pour caractériser l’activité des différents types de volcans et mettre en œuvre des mesures de prévention.
1- Les coulées de laves plus ou moins fluides qui accompagnent les éruptions effusives (ex : Kilauea, Mont Cameroun, …) progressent relativement lentement (la population a le temps de s’échapper) aussi les dégâts se concentrent-ils sur l’environnement : destruction de forêts, de plantations, de constructions et de divers aménagements (routes coupées).
2- Les projections explosives (ex : Stromboli, Piton de la Fournaise, Fuego au Guatemala, Etna) ont lieu quand le magma émis est riche en gaz, Le matériel volcanique (particules solides + gaz) sort du cratère à grande vitesse et s’élève à plus d’un kilomètre de hauteur.
Un panache se développe verticalement (jusqu’à 50 km  de hauteur), s’élargit en forme de champignon ou parapluie, puis s’étend en fonction des vents dominants. De tels événements perturbent le trafic aérien et ont des conséquences économiques importantes.
3- Les nuées ardentes (300 à 500°C) déferlent le long des pentes du volcan à des vitesses de l’ordre de 300 km/h. Avec de telles vitesses elles peuvent remonter le long des pentes ! Elles arrachent tout sur leur passage (forêts soufflées au Mont Saint Helens) : toute fuite devient illusoire. Actuellement à Sumatra le Sinabung émet une nuée ardente par jour.
La signature de telles émissions volcaniques (types 2 et 3) peut être la formation de caldeiras (= chaudrons) dont certaines bien célèbres : Askja, Açores, Santorin, et en Indonésie : Toba (la plus grande connue) et Tengger.
4- Les émissions gazeuses (soufre, CO2) : les émissions de CO2 du lac Nyos ont été responsables de nombreuses victimes et de la destruction de troupeaux. La mise en place d’un système d’évacuation par pompage du gaz dissous au fond du lac a permis de rétablir la sécurité pour les personnes vivant en aval.

5- Les risques indirectement liés aux éruptions volcaniques sont nombreux :

    • Coulées boueuses (lahars) formées quand d’épaisses couches de cendres sont imprégnées d’eau lors des moussons, quand l’éruption volcanique se déclenche sous un glacier (Nevado del Ruiz), ou lors de la rupture des flancs d’un lac de cratère.
    • Glissements de terrain liés à l’instabilité des matériaux accumulés

6- L’aléa tsunami peut se manifester à de grandes distances du lieu d’éruption.

Le risque, nul en l’absence d’implantation humaine, peut devenir catastrophique si des installations à haut risque sont présentes (ex : raffinerie susceptible d’exploser et de s’enflammer).
L’échelle de risque établie est graduée de 0 à 8 (éruption « mégacolossale » de Yellowstone).
La cartographie réalisée pour l’île d’Hawaï met en évidence l’importance de la topographie (vallées par lesquelles la lave est susceptible de s’écouler).

L’appréciation de l’impact climatique des éruptions volcaniques est complexe.
La vapeur d’eau et le CO2 sont des gaz à effet de serre susceptibles d’engendrer une hausse de température. Cependant les rayons solaires sont arrêtés par les cendres et les aérosols ce qui a provoqué un refroidissement de 3 dixièmes de degrés sur 3 ou 4 ans (Laki) puis les effets se sont amoindris. À l’occasion de l’éruption du Pinatubo (juin 1991) des mesures régulières de l’opacité de l’atmosphère ont été réalisées, elles permettent de s’interroger sur ce que seraient les effets de l’éruption d’un super volcan tel que le Yellowstone (actuellement 300 geysers dans le parc) : une super éruption engendrerait des super dégâts. Il y a 2,1 Ma, 1,3 Ma et 0,64 Ma, respectivement 2 450, 280 et 1 000 km3 de matériaux avaient été émis … Une baisse de température de 10 à 15 °C ne serait alors pas impossible.

La prévention est essentiellement basée sur la surveillance des volcans.

      • observations de terrain : capteurs mobiles enregistrant différents paramètres (séismes, déformations, variations thermiques), échantillonnage de roches ;
      • travaux de laboratoire sur les échantillons collectés (type de laves émises, datation des éruptions antérieures) et sur les données enregistrées ;
      • certains volcans sont équipés d’observatoires (montagne Pelée, Montserrat) : ils enregistrent en continu différents paramètres (température, sismicité) et doivent permettre d’alerter les autorités si des évacuations de populations sont à envisager.

Les moyens à mettre en œuvre en cas d’éruption doivent être préparés : équipes de sécurité civile, médecine d’urgence, accueil de sinistrés, mise en place de signalisations… Les gens apprennent à vivre avec leurs volcans !
Le volcan est souvent déifié dans l’iconographie populaire, il est en effet aussi source de richesse : sols cultivables fertiles, matériaux de construction, minéralisations exploitables, géothermie, tourisme, faune et flore faisant l’objet de classement en Parc naturel, etc.

Questions de l’assemblée

Relation entre contexte de collision de plaques et volcanisme ? Peu de volcanisme dans ce contexte (cas particulier de l’Arménie) (une page et demi seulement dans le traité de Volcanologie, Dunod).

Demande de précisions sur le problème climatique : Le CO2 et la chaleur émis lors d’une éruption dans la troposphère provoquent une élévation de température, mais les matières émises au-delà de la troposphère, dans la stratosphère (SO2, H2O, cendres) lors des éruptions majeures sont responsables de baisses de température. Actuellement l’activité humaine a plus d’impact climatique que les volcans !

Durée de vie d’un volcan ? Il naît un volcan par siècle environ … mais l’acte de décès est difficile à établir. On estime qu’au-delà de 50 000 voire 100 000 ans d’inactivité, un volcan est éteint. La chaîne des Puys (dernières éruptions datées de 8 000 ans) figure sur la liste des 1546 volcans actifs dans le monde, les volcans du Vivarais (30 000 ans) sont un peu plus vieux alors que le Cantal et le Mont Dore sont considérés comme éteints.

Relation possible entre impact d’astéroïde et crise éruptive pouvant déclencher des éruptions (trapps).
Une telle relation est de plus en plus envisagée.

(*)Le conférencier nous invite à retrouver plus d’images sur la toile aux adresses suivantes :
Blog : Volcanmania, http://blogs.futura-sciences.com/bardintzeff/
www.lave-volcans.com/bardintzeff.html
http://44.svt.free.fr/jpg/bardintzeff.htm
www.futura-sciences.com/fr/scientifique/t/terre/d/bardintzeff_80/
http://geosciences.geol.u-psud.fr/spip.php?article199